L’art de l’engagement

Entente de partenariat territorial CALQ – Ville de Laval

Le 30 juillet dernier, le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) et la Ville de Laval, en collaboration avec Culture Laval, annonçaient un soutien de 200 000$ à six artistes et six organismes dans le cadre de l’Entente de partenariat territorial de Laval.

En fournissant les ressources nécessaires au plein déploiement des forces culturelles lavalloises sur le territoire, cette entente a pour objectifs de stimuler la création artistique dans la région et de favoriser la rétention des artistes à Laval. D’ailleurs, des artistes comme Christian Fleury obtiennent leur première bourse du CALQ dans le cadre de cette entente.

La pandémie de la Covid-19 a évidemment eu un impact sur la majorité des projets soutenus, mais plusieurs sont en cours de réalisation.

Survol de quatre des initiatives soutenues 

Cultiver l’engagement

Plusieurs des initiatives soutenues créent des ponts entre les univers du social et de la culture en explorant comment la population lavalloise investit et s’approprie son territoire.

La scénariste, réalisatrice et productrice Lisa Sfriso a entamé la réalisation d’un documentaire sur les initiatives citoyennes dont la visée est de revitaliser le territoire lavallois. « Dès le début de l’écriture, raconte-t-elle, le titre [Du rêve à la réalité] est devenu La théorie des petits pas. Pour ce court métrage, je souhaite poser mon regard de documentariste sur des projets citoyens développés au cœur des quartiers lavallois, afin de répondre à la question suivante : l’implication citoyenne locale peut-elle contribuer à transformer le visage d’un quartier, et créer des milieux de vie écocitoyens? »

Toujours dans la forme documentaire, et explorant lui aussi le thème de l’engagement citoyen, Christian Fleury (première bourse du CALQ) pose dans La rivière un regard sur le rapport qu’entretiennent un pêcheur, un couple de riverains et un militant écologiste avec la Rivière-des-Milles-Iles, sous-valorisée croit-il. Le cinéaste adopte un style inspiré du cinéma direct et ne cache pas sa volonté de contribuer à protéger et à promouvoir les rivières en milieux urbains.

Plus de 10 ans après la création de S’embrasent, un spectacle de l’auteur français Luc Tartar mis en scène par Éric Jean, la compagnie Bluff a décidé de réunir les créateurs de cette pièce pour produire une œuvre sur le thème de l’engagement. La pièce Jusqu’au bout, coproduite par le Théâtre Bluff et le Grand Bleu de Lille, sera diffusée en 2021, soulignant du même coup les trente ans d’activité de la compagnie Bluff.

Pour Verticale – seul centre d’artistes autogéré de Laval et unique centre en diffusion de la couronne nord –, l’Entente a notamment permis de soutenir les talents émergents locaux à travers la mise sur pied d’échanges entre pairs. Comme le souligne Charlotte Panaccio-Letendre, directrice générale du centre, « le Programme de mentorat en recherche-création (à sa 6e édition) et le Programme de mentorat en écriture (une nouveauté!) ont donné respectivement lieu aux projets Si tu ne me vois pas, est-ce que j’existe toujours ? de Stéphanie Bourgault et Julie Lequin (mentore) et Emprunter (le bout de l’île) de Eve Laliberté et Lise Lamarche (mentore). Ces artistes ont également fait preuve d’agilité pour rejoindre des publics dans le contexte imposé par la crise sanitaire. « Stéphanie (Bourgault) a créé une installation composée d’une sculpture et d’une projection et l’a activé dans des parcs sans l’annoncer, pour surprendre les spectateurs potentiels dans leur quotidien », ajoute la directrice de Verticale.

Manœuvrer la crise, entre potentialités et restrictions

La COVID-19 a affecté l’ensemble des éléments de la chaine culturelle, de la création à la réception. Lisa Sfriso a pris la décision d’attendre que Laval ne soit plus en zone rouge pour produire son documentaire. « Un documentaire sur l’engagement citoyen en lien avec la revitalisation urbaine en temps de COVID, c’est un sacré défi. Les citoyens et citoyennes que j’ai approchés pour ce film continuent pour la plupart leurs implications, mais celles-ci sont toutes transposées en rencontres virtuelles, ce qui n’est pas l’option la plus cinématographique! », dit-elle.

D’autres projets sont en quelque sorte héritiers des contraintes imposées par la pandémie. Christian Fleury s’est tourné vers l’écriture de son documentaire après s’être retrouvé sans contrat ni assignation et que la tournée de son précédent documentaire, Trois Saisons de Sarony, ait été brusquement interrompue.

Quant à la vie publique de la pièce Jusqu’au bout de Bluff, la tournée est reportée en raison des mesures sanitaires. « Néanmoins, nous avons pu maintenir les répétitions, procéder à la création du spectacle et maintenir à l’emploi une vingtaine de pigistes », souligne Mario Borges, optimiste. Il ajoute également qu’à terme, « le projet nourrira les échanges internationaux, renforcera le rayonnement de Bluff en France, stimulera la démarche créative de deux créateurs, concrétisera la création d’une œuvre originale et agira comme levier de futurs projets de coproduction et de partenariats artistiques ».

Charlotte Panaccio-Letendre souligne comment la pandémie a affecté la création des projets soutenus dans le cadre de l’Entente : « Avec Emprunter (le bout de l’île), Ève s’est inspirée de ses promenades répétitives et solitaires sur les mêmes 2.7 km de rue pour imaginer à distance la vie de personnes de son quartier qu’elle croisait ».

Décentraliser l’offre culturelle

Les artistes et organismes soutenus estiment que malgré la sévérité sans précédent de la crise, le milieu culturel lavallois demeurera dynamique avec un soutien adéquat.

« Tant qu’il y a des habitants lavallois, il y a une culture lavalloise.  À titre de documentariste, je crois que c’est le partage de cette culture qui y donne sa vitalité », affirme Christian Fleury. Le cinéaste rappelle que la culture a besoin d’une existence publique pour agir comme vecteur de changement, et que le partage des idées est une composante essentielle de la pleine réalisation de la vitalité culturelle lavalloise.

Charlotte Panaccio-Letendre estime que l’Entente de partenariat territorial contribue à dynamiser la culture lavalloise : « Le projet (les mentorats) de Verticale soutenu par l’Entente participe à la vitalité culturelle lavalloise en favorisant la rétention des artistes visuels sur le territoire; en soutenant le travail de recherche-création essentiel au développement de la pratique artistique; en permettant l’apprentissage de la profession à des artistes de la relève et en invitant des pairs (mentors) reconnus du milieu des arts visuels à collaborer au développement de l’art actuel à Laval par l’entremise de Verticale », affirme-t-elle.

Pour en savoir plus sur l’Entente de partenariat CALQ-Ville de Laval et les projets soutenus, suivez ce lien.

Jonathan Rouleau

Image tirée du documentaire de Lisa Sfriso, La théorie des petits pas